L’efficacité énergétique des bâtiments commerciaux au Québec: Un investissement rentable et durable

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Par Louis-Nicolas Hamer, ing., Président eco2max inc.
Article paru dans la revue VECTEUR environnement, vol. 42, no 3, mai 2009

En investissant dans les technologies vertes, les entreprises peuvent maximiser l’efficacité énergétique de leurs installations tout en économisant sur leurs frais d’exploitation. Preuve que récession ou pas, investir dans les technologies vertes, c’est payant!

En ces temps économiquement difficiles, plusieurs entreprises renoncent à l’implantation de technologies vertes en invoquant les coûts qu’ils jugent trop importants. Pourtant, plusieurs nouvelles technologies permettent de générer des économies appréciables ainsi qu’un retour sur investissement très rapide. Sans compter que plusieurs organismes offrent de généreuses subventions pour inciter les entreprises à moderniser leurs installations.

L’efficacité énergétique : rentable et écologique

En implantant ces nouvelles technologies, toutes les catégories d’entreprises au Québec peuvent afficher une meilleure rentabilité tout en diminuant leur consommation énergétique et leur empreinte écologique. Prenons comme exemple les coûts énergétiques reliés à l’exploitation d’une chambre d’hôtel. Selon l’Office de l’efficacité énergétique (OEE), au Canada, les coûts moyens d’exploitation par chambre ont augmenté de plus de 500 $ entre 1990 et 2000. Il en va de même pour les restaurants et cuisines institutionnelles qui détiennent la première place du palmarès des plus grands consommateurs d’énergie par pied carré. Nombreux sont les bâtiments au Québec qui souffrent également d’une isolation déficiente ainsi que de systèmes de chauffage et de ventilation désuets et dispendieux.

Un pas de plus vers l’écoresponsabilité

Au cours des dernières années, un virage vert s’est amorcé, transformant ainsi les habitudes de consommation des citoyens et gagnant l’appui de nombreuses organisations désireuses de limiter l’empreinte écologique de leurs activités. Un sondage pancanadien, effectué en 2006 par l’Association des Hôtels du Canada, indique à ce propos que 6 Canadiens sur 10 recherchent des établissements hôteliers respectueux de l’environnement pour leurs plans de voyage. On assiste également à une forte croissance d'organismes et d’entreprises exigeant que leurs événements soient « verts », « zéro déchet » ou « carboneutres ».

De leur côté, plusieurs organisations qui ont entrepris ce virage intègrent les valeurs du développement durable dans leur plan d’affaires. Soulignons à cet égard que depuis l’adoption de la Loi sur le développement durable du Québec en 2006, les entreprises sont encouragées à adopter des pratiques responsables et à considérer l’impact économique, environnemental et social de leurs activités. En outre, l’écoresponsabilité croît en popularité auprès des citoyens et devient maintenant la norme pour plusieurs instances gouvernementales et entreprises. En effet, l’application à l’ensemble des fournisseurs du gouvernement du Québec de la politique d’acquisitions écoresponsables des ministères et organismes gouvernementaux incite de plus en plus d’entreprises à se conformer à des critères d’écoresponsabilité et à exiger le respect des mêmes normes par leurs propres fournisseurs.

Les technologies et les subventions sont au rendez-vous

Si les pressions sur les entreprises se multiplient, de nouvelles technologies voient le jour et des subventions sont au rendez-vous. Depuis les cinq dernières années, des ingénieurs, architectes et autres intervenants du milieu de la construction ont développé des solutions technologiques et innovatrices pour diminuer la consommation énergétique des bâtiments ainsi que leur empreinte écologique. Une multitude de technologies simples et peu coûteuses sont maintenant disponibles, bien que peu d’entreprises reliées à la construction soient présentement en mesure de conseiller les dirigeants d’entreprises pour leur implantation.

En outre, plusieurs organismes comme Hydro-Québec, Gaz Métro, l’Agence de l’efficacité énergétique (AEE) et l’OEE ont créé des programmes permettant de venir en aide aux entreprises désirant apporter des mesures d’efficacité énergétique à leurs installations, tout en contribuant à l’amélioration de la santé de l’environnement et à la santé financière des entreprises. Pour y être admissibles, ces entreprises doivent recruter une firme spécialisée, habilitée à conseiller les mesures d’efficacité énergétique appropriées et à démontrer les économies potentielles, afin de les guider adéquatement dans leurs différentes décisions de rénovation et de modernisation de leurs installations.

Quelques exemples de technologies vertes:

L’éclairage

L’éclairage est sans contredit le système le plus facile à remplacer et le retour sur investissement est souvent une affaire de seulement quelques mois. Il est maintenant bien connu que les ampoules incandescentes peuvent être remplacées par des ampoules fluocompactes qui consomment 75 % moins d’électricité. Par contre, peu de gens savent que les lampes fluorescentes de type T12 peuvent être remplacées par de nouvelles lampes de type T8 ou T5, beaucoup plus efficaces. Avec ces simples mesures, de grandes économies peuvent être réalisées, par exemple dans les hôtels et restaurants où l’éclairage correspond respectivement à 33 % et 23 % de toute leur consommation énergétique.

Le chauffage

Avec les hivers rigoureux que connaît le Québec, les coûts de chauffage représentent un autre poste de dépenses important. Pour reprendre notre exemple, ces frais peuvent représenter de 23 % à 35 % de la consommation énergétique des restaurants et des hôtels. Pourtant, des systèmes tout simples peuvent diminuer ces coûts. En voici quelques exemples :

  • Thermostats électroniques programmables : maintenant à la portée de tous, ils sont de plus en plus utilisés et ils ont un impact immédiat.
  • Systèmes de ventilation : l’apport en air neuf des bâtiments peut être régulé par des sondes de CO2 permettant de moduler l’entrée d’air frais en période hivernale, tout en assurant le confort des occupants.
  • Systèmes de récupération de chaleur : ces systèmes permettent d’extraire la chaleur de l’air vicié qui est rejeté vers l’extérieur et de réinjecter cette même chaleur pour préchauffer l’apport en air neuf (par exemple, une roue thermique peut être installée dans une unité de chauffage, de ventilation et de climatisation et agir comme récupérateur de chaleur).

Avec un retour sur investissement qui varie entre un et quatre ans, toutes ces mesures devraient être adoptées pour tous les types de bâtiments.

Les énergies renouvelables

Par ailleurs, les énergies renouvelables sont également très intéressantes pour les entreprises. Si la géothermie et les panneaux photovoltaïques gagnent en popularité, d’autres technologies efficaces et moins coûteuses se sont développées au cours des dernières années, telles que le mur solaire et les capteurs solaires.

Le mur solaire est une façon ingénieuse de préchauffer l’apport en air neuf qui entre dans le bâtiment et plus particulièrement lorsqu’on dispose d’un mur suffisamment grand et faisant face au sud ou au sud-ouest. Il est constitué d’une tôle métallique perforée de couleur foncée. L’air qui entre en contact avec cette plaque est réchauffé et ensuite aspiré par les petits orifices du mur grâce à des ventilateurs situés au sommet du mur porteur, pour se retrouver dans l’espace entre la tôle et le mur porteur du bâtiment. L’air préchauffé est ensuite distribué dans le bâtiment par le système de ventilation. Le système est contrôlé par un volet mécanique et est fermé automatiquement en période estivale. Le retour sur investissement de ce type d’installation est d’environ trois ans.

Quant aux capteurs solaires « sous vide », encore relativement peu connus, ils sont composés d’une série de tubes en verre d’environ 5 à 15 centimètres de diamètre. Chaque tube comprend un absorbeur captant le rayonnement solaire ainsi qu’un échangeur permettant le transfert de l’énergie thermique. Ils sont habituellement installés sur le toit du bâtiment et utilisés pour préchauffer l’eau chaude.

Étude de cas

L’Hôtel Le Président de Sherbrooke a récemment décidé de procéder à des travaux de modernisation afin d’améliorer l’efficacité énergétique de ses installations. Au total, environ 250 000 $ auront été investis à la fin des travaux pour mieux isoler le toit, changer les unités de chauffage, de ventilation et de climatisation par des unités plus efficaces et dotées de roues thermiques, ainsi que pour remplacer l’éclairage actuel par des ampoules fluocompactes et des lampes de type T8. S’ajoute à ces travaux l’installation d’un système de déshumidification de la piscine intérieure avec un récupérateur de chaleur permettant de préchauffer l’air ambiant et l’eau du bassin. Les subventions anticipées sont de l’ordre de 135 000 $, alors que les économies d’énergie annuelles prévues sont de l’ordre de 37 000 $. En calculant l’ensemble des frais directs et indirects de ces travaux, l’hôtel prévoit pouvoir récupérer son investissement sur une période d’environ quatre ans.

Vers un Québec plus vert et durable

Tout en profitant de subventions pouvant atteindre jusqu’à 40 % des coûts de modernisation, les entreprises québécoises peuvent optimiser l’efficacité énergétique de leurs bâtiments et espérer un retour sur investissement excessivement rapide. Plusieurs mesures permettent en effet une économie d’énergie de 25 à 40 % et une période de récupération de l’investissement de un à quatre ans, certaines en moins d’un an. Remboursés par les économies d’énergie, les investissements de départ génèrent ainsi un accroissement rapide de rentabilité. Et quoi de plus important que de gérer ses coûts d’exploitation en période de crise économique. Or, plus que tout, en abaissant l’empreinte écologique des entreprises, ces investissements contribuent à un Québec plus vert et durable. Sans oublier que les kilowattheures non consommés au Québec peuvent être exportés, contribuant ainsi à la prospérité de tous.